Deux jours au Val de Bagnes et le Vanil de l’Ecri pour apprivoiser ma peur du vide

Louvie – Termin – Verbier

Un coup de tête, je vais passer une nuit en cabane ! Cela fait depuis longtemps, 2016, lors de mon abandon sur le GR5, que je ne suis pas partie en cabane seule.

Avec quelques appréhensions, du courage, de l’envie, je réserve un dortoir à la cabane de Louvie. Je m’y suis déjà rendue, il y a peut-être 20 ans. Je choisis exprès cette cabane, car le chemin depuis Fionnay comporte un passage avec des chaînes. Je rejoins le départ en bus postal en milieu d’après-midi, deux heures de montée dans une chaleur torride, je marche en faisant une pause eau à chaque passage ombragé. Arrivée, le lac me tend les bras et une baignade revigorante, rafraîchissante me remet d’aplomb. Je suis toute contente d’être là, le calme de la montagne, la soirée qui s’écoule, la gardienne accueillante, le coucher de soleil sur le Grand Combin, tout concourt à mon bien-être.

Comme la journée du lendemain compte autour de 4h de marche, je ne suis pas une des premières debout. La destination du jour, les Ruinettes, voire Verbier, par le col de Termin. Je longe le lac avec de merveilleux reflets en ce début de journée puis le sentier grimpe régulièrement en direction du col. Je choisis le chemin le plus direct, sans passer par le col de Louvie. La plupart des randonneurs partent sur Prafleuri ou Mauvoisin en suivant le trajet de la Via Alpina. Je fais un peu figure de touriste.

Je découvre deux femelles bouquetins et un petit en contrebas du chemin, au lieu de partir, une des mères appelle et un autre jeune les rejoint avant qu’ils s’éloignent tous ensemble. Moment de grâce. Le cliché du petit dans la falaise n’est pas excellent, le souvenir oui.
Le sentier monte à flanc de coteau et la pente en dessous commence à m’impressionner. Je respire, me concentre et continue jusqu’à me retrouver sur un chemin de crête, qui me permet d’apercevoir le lac de Louvie d’un côté et la vallée de Bagnes de l’autre. Ça rentre dans le concret. Je reprends mon chemin, un pas après l’autre, et petit à petit, je me sens de mieux en mieux. J’arrive au col presque sereine et regarde la vue plongeante de chaque côté avec de plus en plus de plaisir. Une belle pause, j’échange avec trois anglaises venant de Chamonix, puis un couple qui vient de la Cabane du Mont-Fort avec lequel nous partageons tout le bonheur d’être là en montagne.

La suite se passe comme sur un nuage, j’avance facilement sur ce chemin d’altitude, attentive lors de quelques passages, sans appréhension inutile cependant.

Au point 2544m, le chemin devient blanc-bleu. J’hésite quelque peu, il est encore tôt, bien avant midi, le ciel est limpide, le dénivelé quasi inexistant, je m’engage en me disant que j’ai largement le temps de faire demi-tour le cas échéant. C’est un sentier du même genre que j’ai parcouru jusqu’à maintenant, c’est le risque élevé de chutes de pierre depuis le Bec des Rosses qui lui donne ce critère. J’y suis tellement bien, que je loupe la bifurcation pour la Chaux et que je me retrouve finalement à la Cabane du Mont-Fort. J’en profite pour manger une assiette. Il y a surtout des vététistes et quelques randonneurs qui semblent être venus plutôt en télécabine et télésiège.

Jusque là, la température était idéale, avec une brise rafraichissante et le chemin principalement à l’ombre.

Je repars, direction les Fontanets. Et là je suis rattrapée par la fonction première de Verbier. Station de sports, les pistes sont des verrues grises sans végétation et le chemin pédestre est transformé en piste de descente VTT. Ni une ni deux, je descends en télésiège jusqu’aux Ruinettes.
Je sais, pour l’avoir déjà emprunté, que le sentier entre les Ruinettes et Verbier est en lacets dans la forêt et je descends donc à pied cette dernière partie. Plus je descends, plus la chaleur se fait sentir. Arrivée au village, j’utilise la télécabine pour rejoindre le Châble.

Je sais que je dois encore me confronter à ma peur du vide pour valider ce progrès, je le ferai quelques jours plus tard, au Vanil de l’Ecri.

Nathalie

Premier jour
Distance 4.10 km – dénivelé ↑760 m – durée indiquée 2h15

Itinéraire

Deuxième jour Louvie Fontanets
Distance 10.5 km – dénivelé ↑860m ↓616m  – durée indiquée 4h

Itinéraire

Deuxième jour les Ruinettes Verbier
Distance 5.2 km – dénivelé ↑44m ↓722m –  durée indiquée 1h35

Itinéraire

Vanil de l’Ecri

Après ma sortie de deux jours à apprivoiser la peur du vide, je savais que je devais encore une fois me tester. C’est le Vanil de l’Ecri qui s’impose, comme un passage obligé.

Il y a environ 40 ans, j’étais montée avec mes parents à la Cabane de Bounavau et malgré mon envie, nous n’avions pas continué au-delà. Depuis je n’ai jamais réussi à aller plus haut, pour différentes raisons, cette fois-ci sera la bonne, je le sais.

Depuis le parking des Baudes, la montée est encore partiellement à l’ombre. Je suis à côté de mes pompes et perdue dans mes pensées. A la cabane, les bénévoles sont accueillants et je bois un café avant de repartir. Une photo pour immortaliser les panneaux que je dépasse enfin ! et je chemine en direction de Bounavaletta. Dépassée par deux trailers, je regarde leur progression dans la pente et prend conscience de ce qui m’attend. J’enchaîne les lacets l’un après l’autre, pas complètement sereine. Près d’un gros rocher, je m’arrête, observe, respire et comprend que cette peur fait partie de mon histoire familiale et qu’elle est probablement celle de mon père. J’ai des souvenirs où il m’ordonne de ne pas m’approcher du bord (aux Rochers de Naye) et une passerelle qu’il n’a jamais pu traverser (aux gorges de la Borgne ?). Je passe un certain temps à assimiler puis repars tranquillement, sereine et un peu éberluée. Au Plan des eaux, je contemple le Vanil Noir, je ne suis pas encore prête pour lui, certainement un jour, pourquoi pas avec un guide.

La dernière partie jusqu’à la Croix me demande un effort intense, même si le terrain n’est pas très exigeant. Au sommet, je rencontre un randonneur qui revient de la Pointe de Paray, une première pour lui, il me dit que cela est plus facile qu’il n’y parait. Je lui raconte que je suis ici pour guérir ma peur du vide et que cela suffit largement pour aujourd’hui. Il me demande si j’ai vu les bouquetins en montant, malheureusement pas, il faut dire que j’étais dans un autre monde.

Après son départ, un trailer qui m’avait aussi dépassé dans la montée avant de bifurquer vers le col de Bounavaletta, me raconte sa matinée.
Départ à 5h, il a enchaîné Dent de Broc, Dent du Chamois, Dent de Bourgo, les Merlas, le Van, le Tsermont, le Vanil Noir, l’Ecri, il continuera jusqu’à la Pointe de Paray et je le verrai redescendre sur Bounavau lors de ma pause pique-nique un peu plus tard. Il s’entraine pour Sierre Zinal et l’Ultraks de Zermatt. Il a relativement effectué peu de kilomètres, 25km, cependant déjà 3000m de dénivelé positif. Je reste entre une sensation admirative et dubitative.

Après son départ, je flâne encore un moment et ai tout loisir de contempler deux aigles qui tournoient autour de la Pointe de Paray. Comme il est encore tôt, je décide de redescendre et de manger plus tard.

La descente se passe à merveille, je suis vraiment à l’aise. Je m’arrête sous un sapin à l’ombre pour une pause ravitaillement et rejoins la cabane, peu fréquentée à cause de la chaleur, selon les bénévoles. Après une boisson fraîche, quelques échanges avec les personnes présentes, je finis la randonnée le cœur et les pas légers.

Quelques courbatures les jours suivants témoignent de l’effort physique et psychique que j’ai fourni…

Nathalie

PS J’ai aussi moins de photos que d’ordinaire.

 Distance 9.2 km – dénivelé ↑↓1146m – durée indiquée 4h50

Itinéraire